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Le manuscrit français 2188 de la Bibliothèque nationale de France est le témoin unique d’un curieux texte, le plus long et le plus leste des fabliaux, copié dans la seconde moitié du XIIIe siècle et qui nomme son auteur, aussi méconnu que son ouvrage est esseulé, Douin de Lavesne.
Trubert, cet antagoniste de la courtoisie et de la sagesse, est " un sauvage et un sot ". Vilain borné, inculte, impie à force d’ignorance, il est aussi trompeur, détrousseur, égrillard, éventreur. En le dotant de la nature trouble des fous, et en le plongeant dans un " roman à rire ", Douin fournit le contre-exemple de la tradition hostile au vilain. Au rythme des fables qui s’accumulent dans ce gros fabliau, Trubert satisfait son appétit du gain, assouvit son appétence jouissive et surtout exerce son goût immodéré pour l’acharnement méchant. Tant de malfaisance risible de la part d’un seul – tour à tour négociant simplet et chanceux, médecin fruste et fourbe, chevalier Haudecœur effarant et efficace, travesti Coillebaude profiteur et prophète, dérisoire David aux prises avec un nouveau Golïas –, pique l’attention, force la complaisance pour ses affaires et établit en définitive notre indulgence pour le personnage.